La diaspora, la presse et la classe politique : portrait d’une relation triangulaire crispée

Version imprimableEnvoyer à un amiVersion PDF

Les gouvernements successifs au Niger se sont illustrés par la prévalence de controverses et autres scandales politico-financiers ayant suscité émoi et indignation non seulement sur place, mais aussi au sein de la diaspora. Des voix dénoncent une gestion-épouvantail, d’autres, une classe politique « exécrable ». A succession de temps, la consternation s’empare de tous les nerfs et laisse s’installer un débat viral qui renforce le désamour et empêche qu’on s’attarde sur le fond des questions pendantes.

La presse privée, formidable outil démocratique, appelée à informer en vue d’éduquer (principale source d’abreuvage sur la situation du pays pour les Nigériens donc de l’extérieur), prend un malin plaisir à se livrer à la tentation irrésistible d’un cynisme lucratif et parvient, en raison de son caractère sensationnel, à stagner les discussions presqu’exclusivement autour du revers, du dramatique, ou encore du sentimental, occultant obstinément la nécessité de la proposition et de la réflexion aux solutions. 
 
C’est ainsi qu’à l’exception de l’organe gouvernemental, le Sahel, qui s’efforce d’offrir un regard sur l’action gouvernementale et d’ouvrir un espace réel sur des perspectives de société, en consacrant des pans entiers de ses colonnes sur des questions de  santé, d’économie, d’éducation, d’environnement (pour n’en citer que cela), la presse écrite s’est bornée à leur réserver plutôt un portail contigu, préférant attiser des frustrations au demeurant justifiables et légitimes, afin de s’assurer une lisibilité.

C'est pourquoi, au nom de l'amour que nous avons pour elle et de notre attachement à sa liberté, il faut que nous puissions vaincre la peur de la controverse pour fustiger avec énergie cette constipation de la presse, cette entreprise de mutilation des esprits, car autant les politiciens sont coupables, autant certains milieux journalistiques manquent d’éclat professionnel et de considération pour le public et exhibent une conception paranoïaque de leur rôle. 

S’agissant de la classe politique, éclaboussée, au contact avec le pouvoir, dans d’innombrables compromissions et focus principal des journaux et des conversations de salon, elle ne manque pourtant pas d’attrait positif.

La ferme détermination de ces acteurs à assoir un mécanisme électoral crédible, notamment en œuvrant à sa bonne organisation et en acceptant, à l’exception de l’époque trouble de Mainassara Baré, les résultats des nombreuses échéances locales, municipales, législatives et présidentielles tenues les 20 dernières années et jugées justes, équitables et transparentes, avec au comble du succès toutes les fois, des félicitations par les perdants, aux vainqueurs, mais dont on ne semble guère se réjouir, constitue irréfutablement une exception nigérienne. Bon nombre de pays africains dont on cite pourtant l’exemplarité démocratique, sont confrontés en effet, tantôt à de vives tensions, des violences pré-électorales ou postélectorales, tantôt à la mauvaise foi légendaire qu’ont les perdants à reconnaitre les résultats, même lorsqu’ils sont justes, préférant pour chasser le froid, nuire à la respectabilité de leurs pays.

Ce sont aussi ces mêmes acteurs,  dont beaucoup sortaient même du camp au pouvoir, qui avaient commencé les premiers à sévir contre les réflexes despotiques du Président déchu et les gestations embryonnaires de son entreprise. Au Niger, la classe politique a énormément contribué à cette paix qui nous fait beaucoup espérer et rêver.

Dans une plus large mesure par ailleurs, la fidélité hallucinante des militants aux positions de leurs leaders respectifs, établie que ces derniers restent, du moins aux yeux des premiers, suffisamment populaires et donc porteurs de mandat. L’admissibilité d’un tel constat exigerait alors de répudier les positions sulfureuses, irréalistes, et antidémocratiques qui demanderaient de les excommunier et recommande qu’on passe du décor au fond. 

Ces indicateurs supposent la présence d’angles positifs à capitaliser dans la recherche d’issue aux autres problèmes tels que la corruption, pourvu que les lamentations s’estompent. Comme si les lamentations suffiraient à les disqualifier, comme si les disqualifier suffirait à éradiquer le mal.

La question de la corruption est d’ailleurs une aberration sociale et systémique qui appelle à bien plus que la disqualification d’un groupe, mais à un travail transversal qui, pour bien être mené, exige qu’on sorte le débat de cette configuration, pour l’inscrire dans une approche encline à l’identification des acquis, à l’étude des problèmes, et à la recherche de solutions réelles et durables, afin de procéder au modelage de la relève générationnelle.

Comme tout citoyen lambda, le politicien au demeurant, est lui-même un mortel avec vertus et défauts, honnête et malhonnête, patriote et fuyant.  La  propension à le déshumaniser n’est que la facilité que l’on s’offre à stigmatiser, en raison d’actes et comportements dont on est soit même, à vrai dire à plusieurs fois déjà, coupable.

 

Commentaires

Publier un nouveau commentaire

Le contenu de ce champ sera maintenu privé et ne sera pas affiché publiquement.
  • Les adresses de pages web et de messagerie électronique sont transformées en liens automatiquement.

Plus d'informations sur les options de formatage

CAPTCHA
Protection contre le spam : cette question permet d'éviter l'envoi des spams par les robots
Image CAPTCHA
Enter the characters shown in the image.