Quelle est la situation énergétique au Niger ? Quels sont les acquis à consolider et les priorités à souligner ? Cette étude vise à présenter de façon aussi intelligible que possible les données disponibles sur le secteur énergétique nigérien et à dégager des objectifs clairs que doit atteindre la politique énergétique du Niger. L’étude s’adresse à tous les publics : étudiants, professionnels, décideurs politiques et économiques, citoyens…
Elle se compose de 5 parties essentielles. La 1ère partie dresse le bilan énergétique du pays en s’attachant à mettre en perspective les chiffres les plus marquants. La 2ème partie est consacrée à la présentation des potentialités incomparables dont recèle le pays. La 3ème partie s’attache à mettre en lumière les réussites et les échecs de la politique énergétique. La 4ème partie plaide pour quelques pistes essentielles pour bâtir un projet de politique énergétique à la mesure des défis du Niger. Enfin la 5ème partie est une annexe qui décrit le cadre institutionnel et le contexte législatif de l’énergie au Niger.
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La consommation globale en énergie primaire du Niger s’est établie à environ 2,6 millions de tep en 2000. La consommation par tête, 0.242 tep par habitant, est l’une des plus faibles du monde.
Figure 1 : Une des plus faibles consommations d'énergie primaire au monde
Le bilan énergétique du Niger fait apparaître une prédominance écrasante de la biomasse (bois-énergie et résidus agricoles) avec 93 % du bilan de la consommation primaire. Les autres énergies (pétrole, gaz, électricité…) ne représentent que 7 % du bilan global.
En termes de consommation finale, c’est le secteur résidentiel-tertiaire qui domine le tableau avec 95,1 %, largement devant l’ensemble des secteurs productifs qui représentent 4,9 % du bilan dont 4,13 % pour le transport ; 0,75 % pour le secteur industrie-mines et enfin 0,02 % pour l’agriculture.
La consommation électrique globale a été de 465 GWh en 2003. La production nationale ne représente que 40 % de l’électricité consommée au Niger avec 6 % pour la NIGELEC (Société Nigérienne d’Electricité) et 34 % pour la SONICHAR (Société Nigérienne de Charbon). Ainsi, le Niger importe 60 % de son électricité en provenance du Nigeria.
La puissance installée sur l’ensemble du pays est lilliputienne : environ 70 MW dont 37 MW pour la SONICHAR. Presque l’ensemble des unités de production électrique installées utilisent des sources fossiles : gaz pour 2 turbines à gaz (10 MW chacune, mises en service en 1980 et 1982) ; diesel pour les groupes électrogènes de Goudel (12 MW, mise en service en 1985), de Zinder (5,2 MW, mise en service en 1993), de Tahoua (3 MW, mise en service en 1993) ; charbon pour les turbines de la SONICHAR (18,8 MW chacune, mises en service en 1981 et 1982).
Le réseau électrique national est constitué de 800 km de lignes de transport et 2700 km de lignes de distribution. Ces chiffres sont à rapprocher avec l’immensité du pays : 1 267 000 km2. Ce qui conduit à une couverture électrique extrêmement faible avec un taux d’accès au réseau électrique national de 6,5 %. L’accès à l’électricité est très discriminatoire selon les zones d’habitation avec une moyenne de 30 % pour les zones urbaines et seulement 0,1 % pour les zones rurales qui abritent plus de 80 % de la population nigérienne.
La consommation des énergies fossiles est constituée essentiellement de produits pétroliers et de charbon. La consommation de gaz est marginale du fait de l’absence de réseaux gaziers urbains et la faiblesse des circuits de distribution de gaz en bouteilles.
En 2003 la consommation de produits pétroliers s’est élevée à environ 180 000 m3. La SONIDEP (Société Nigérienne des Produits Pétroliers) a une capacité de stockage installée de 48 000 m3 dont une réserve de sécurité de 12 000 m3 qui correspond à 25 jours de consommation.
Pour la même année, 150 000 t de charbon ont été produites et consommées par la SONICHAR.
La totalité des énergies fossiles est importée, à l’exception du charbon.
Comme pour le bilan énergétique global, la biomasse domine le tableau des énergies renouvelables. C’est l’unique source d’énergie pour plus de 90 % des ménages nigériens.
La consommation annuelle totale de biomasse s’élève à 200 000 t de bois et quelques dizaines de tonnes de charbon de bois. Cette consommation représente 700 000 stères de bois, soit entre 100 000 et 150 000 ha prélevés chaque année sur le maigre couvert végétal d’un pays à deux tiers désertique.
Compte-tenu de l’insuffisance des programmes de reboisement, l’exploitation du bois-énergie est une des problématiques environnementales majeures à laquelle le Niger doit faire face.
En dehors de la biomasse, l’exploitation d’autres formes d’énergies renouvelables est anecdotique. L’hydroélectrique malgré toutes ses promesses n’en est qu’à ses balbutiements, avec le projet Kandadji qui est en phase de réalisation.
L’énergie solaire est largement sous-exploitée eu égard à l’incroyable potentiel du pays. En 2001, la puissance installée est seulement de 435 kWc destinés aux secteurs de l’hydraulique (pompage et irrigation), des télécommunications (antennes hertziennes) et de l’électricité rurale (éclairage des écoles, réfrigération, dispensaires…).
Une quarantaine d’installations éoliennes sont mises en place et destinées aux adductions d’eau isolées, à l’irrigation et à la pisciculture.
Le Niger est un des producteurs mondiaux d’uranium les plus significatifs. Il se classe 6ème en 2008 avec 3032 t. L’exploitation a commencé à la fin des années 60. Deux entreprises d’exploitation sont actuellement en activité dans la zone de l’Aïr pour le compte de la multinationale nucléaire française AREVA : SOMAIR (Société des Mines de l’Aïr) et COMINAK (Compagnie Minière d’Akouta). À cela il faut ajouter une multitudes de projets d’exploitation du minerai d’uranium à des stades d’avancement entre la prospection et la réalisation dont le plus significatif est la mine d’IMOURAREN qui est annoncée avec une capacité de 5 000 t par an.
En dépit de cette richesse, l’uranium ne rentre dans aucune forme de production énergétique sur le territoire nigérien.
Il n’y aucune commune mesure entre la faible consommation énergétique du Niger et les potentialités considérables emprisonnées dans son sous-sol, dans ses eaux, son ciel…
Les travaux de prospection ont démontré que le Niger dispose de réserves appréciables en énergies fossiles (pétrole, gaz et charbon).
Le pétrole et le gaz sont recherchés sur les bassins oriental (bassin du Tchad) et occidental (bassin des Iulemeden) qui recouvrent près de 90 % de la superficie du pays.
Le champ le plus avancé est celui d’Agadem dans l’Est du pays. Il y est prouvé l’existence de 350 millions de barils de pétrole.
En juin 2008, le gouvernement nigérien a approuvé, un contrat de partage de production avec la société CNODC (China National Oil and Gas Development and Exploration Corporation), filiale du groupe CNPC (China National Petroleum Corporation). Le montant de l’investissement est estimé à environ 5 milliards de dollars1. Les réalisations attendues les plus significatives sont la pose d’un pipeline en direction du port de Cotonou (Bénin), destiné à exporter les hydrocarbures et la construction et la mise en service, dans un délai de trois ans, d'une raffinerie d'une capacité de 20 000 barils par jour. Pour rappel les besoins actuels du marché national en produits pétroliers sont d’environ 7 000 barils par jour.
A l’heure actuelle cet accord est encore au stade de réalisation. Nombre d’aspects de ce projet demeurent encore flous et suscitent des interrogations fondées. À quoi correspond le « bonus de signature » de 300 millions de dollars annoncé en grande pompe par le gouvernement nigérien ? Quelle est l’étendue et la durée de la concession accordée aux chinois ? En dehors des taxes redevables quelle sera la part du Niger dans le capital et l’exploitation de ce projet ? Quel est le dispositif prévu pour gérer les recettes tirées de cette activité et quel usage en sera fait ?
Néanmoins malgré ces questions légitimes, force est de reconnaître que l’aboutissement du projet d’Agadem est un succès. Un temps les sociétés américaine ExxonMobil et malaysienne Petronas ont détenu le permis d’exploration du site mais n’ont pas souhaité le mettre en exploitation à cause de la faiblesse des réserves prouvées et d’une rentabilité aléatoire liée à un prix de baril alors peu élevé. C’est donc un succès de trouver un partenaire moins hésitant. Par ailleurs la construction d’une raffinerie sur le sol nigérien est la réussite la plus significative du projet car elle va permettre d’alléger la dépendance énergétique du Niger.
Il faut tout compte fait veiller à ce que ce projet contribue à acquérir un savoir faire national afin de susciter l’émergence d’une industrie nigérienne capable de mettre en valeur les futures découvertes pétrolières (par exemple le site du Djado qui est très prometteur).
Le site d’Agadem abrite également 10 milliards de m3 de gaz naturel. On ne sait pas bien si l’exploitation de ces réserves fait également partie de l’accord conclu avec les chinois.
En juillet 2009 un accord a été signé pour la construction d’un gazoduc transsaharien qui permettra d’acheminer le gaz nigérian vers l’Europe via le Niger et l’Algérie à partir de 2015. C’est le projet TSGP (trans-saharian gas pipeline), précédemment appelé Nigal. A l’heure actuelle, la présentation du projet indique que le projet vise entre autres à alimenter les pays traversés en gaz 2. Il n’y a pas plus de précisions disponibles à l’heure actuelle.
Figure 2 : Tracé du projet TSGP
Le projet transsaharien devrait être une opportunité stratégique pour le Niger si le pays sait faire accepter dès aujourd’hui à ses partenaires deux choix pertinents :
Si ces choix sont clairement formulés et leur mise en œuvre rendue prioritaire, alors ce projet est une véritable chance pour le Niger et son gaz.
Un site est exploité depuis une trentaine d’années par la SONICHAR à Anou Araren. Le charbon produit sert essentiellement à la production électrique pour l’alimentation des mines d’Arlit. Une part marginale du charbon produit est carbonisée puis destinée à la consommation domestique en substitution du charbon de bois. La SNCC (Société Nationale de Carbonisation du Charbon) a été créée en 2005 et dotée d’une capacité de production de 20 000 t par an.
Le site d’Anou Araren renferme encore 6 millions de tonnes de réserves, soit 40 ans de consommation au rythme actuel.
Un gisement plus conséquent est mis au jour sur le site de Salkadamna dans l’Azawak avec des réserves estimées à 30 millions de tonnes. Une étude de faisabilité est actuellement en cours, menée par la société publique créée à cet effet, la SNCA (Société Nigérienne de Charbon de l’Azawak)3. Le scénario le plus envisagé à l’heure actuelle inclut la construction d’une centrale électrique thermique de 200 MW ainsi que la production de charbon carbonisé jusqu’à 100 000 t par an à l’horizon 2012.
Ces ressources et ces projets en cours d’études montrent que le charbon a encore un rôle essentiel à jouer dans le mix énergétique nigérien. L’utilisation la plus cruciale sur laquelle le Niger doit mettre fortement l’accent c’est l’utilisation des briquettes de charbon carbonisé pour la substitution du bois-énergie. Il y a au moins deux raisons impérieuses qui militent pour un tel choix :
Mis à part la biomasse dont l'exploitation pose déjà problème pour l'environnement, le potentiel nigérien en énergies renouvelables est pratiquement vierge.
L’énergie éolienne peut-être exploitée pour le développement de l’hydraulique nomade par exemple car la zone Nord du Niger est le siège de vents de 2 à 5 m/s de vitesse.
Mais le véritable potentiel renouvelable du Niger se trouve dans les énergies hydroélectriques et solaires.
Les gisements disponibles sont situés sur le fleuve Niger et ses affluents. Les plus significatifs sont :
Il faut ajouter à cette liste quelques sites mineurs qui pourraient permettre la production de près de 8 GWh par an (Sirba, Gouroubi et Dargol).
A l'heure actuelle seul le projet Kandadji est en cours de réalisation. Le projet est scindé en 2 volets. Les travaux en cours visent la création à l'horizon 2013 du barrage d'une capacité de 1,6 milliards de m3 d'eau et l’aménagement de 6 000 ha de terres irrigués. Ce 1er volet va permettre également de réguler le débit du fleuve afin d'en réduire l'ensablement4.
Le second volet du projet inclut une usine hydroélectrique d'une puissance de 130 MW.
Même si sa capacité a été réduite au cours des années, ce projet imaginé dans les années 70 est très attendu puisqu’il permettra de limiter la dégradation de l’écosystème du fleuve Niger, de réduire la dépendance énergétique et de renforcer les capacités agricoles.
S’il y a un secteur où le Niger doit très légitiment se mordre le doigt c'est bien celui de l'énergie solaire, et ce pour trois raisons essentielles :
Au lieu de mettre en valeur ce gigantesque potentiel, le pays a perdu un temps précieux et sans doute plusieurs places dans les classements mondiaux basés sur le développement. Entre temps l’ONERSOL, devenu CNES (Centre National de l’Energie Solaire) est devenu une coquille désespérément vide et des programmes sérieux de valorisation du soleil tardent à voir le jour.
Pourtant le calcul est simple. Avec un ensoleillement journalier moyen de 6 kWh/m2 et une consommation électrique annuelle de 465 GWh, il suffirait d’une surface de 1,4 km2 de panneaux photovoltaïques (avec un rendement réaliste de 15 %) pour couvrir la totalité des besoins électriques actuels de tout le Niger. Il faut prendre son souffle pour voir les chiffres. C’est 0,00011 % de la superficie du pays ou encore 0,00017 % de la surface désertique !
Il est très clair qu’imaginer l’avenir énergétique du Niger sans une production massive solaire est dénué de sens. Certes les investissements sont élevés pour la technologie photovoltaïque, mais il s’agit d’un pari sur l’avenir. Un pari qui vaut largement le coup.
C’est essentiellement d’uranium qu’il s’agit. Les réserves en termes d’uranium métal sont estimées à près 270 000 t. Suite à la renaissance mondiale du nucléaire les projets d’exploitation d’uranium au Niger font florès : Imouraren, Azelik, …
Alors le Niger peut-il envisager la construction d’une centrale nucléaire pour ses besoins électriques ?
La question mérite d’être posée sans complexe mais avec lucidité. Il n’y a pas de complexe pour un pays producteur d’uranium à envisager la production d’énergie électrique à partir de ce combustible. Le Niger ne doit pas non plus avoir de complexe à se poser une telle question dans la mesure où il appartient à un ensemble régional qui inclut notamment le Nigéria et au sein duquel un tel choix stratégique peut raisonnablement être envisagé.
Mais il faut être lucide et comprendre que le nucléaire n’est qu’une option pour le moment très lointaine voire inaccessible et ce pour diverses raisons.
En effet l’énergie nucléaire implique des investissements très lourds, trop lourds pour un pays comme le Niger. Pour un MW de puissance nucléaire installé, il faut débourser environ 2 millions d’euros. Un réacteur comme l’EPR (environ 1600 MW) revient à près de 3 milliards d’euros, soit près de 2 000 milliards de FCFA. Pour un pays qui a mis plus de 30 ans à trouver 300 milliards de FCFA pour la construction du barrage de Kandadji, c’est clairement hors de portée.
En outre, il faut beaucoup d’eau pour refroidir un réacteur nucléaire. Les installations sont souvent construites sur le bord de mer ou sur la rive d’un fleuve à débit suffisant. Au Niger, seul le fleuve Niger peut être envisagé pour ce rôle. Mais il suffit de se rappeler que ce cours d’eau connaît déjà des problèmes de débit et d’ensablement pour comprendre que détourner son cours pour refroidir un réacteur nucléaire n’est pas une option optimale.
Enfin, il ne faut pas se mentir. A l’heure actuelle les compétences nécessaires (ouvriers, techniciens, ingénieurs) pour exploiter et maintenir un réacteur nucléaire sont insuffisantes au Niger.
Tout compte fait il apparaît que l’option nucléaire ne doit pas détourner le pays de ses véritables priorités et atouts : les énergies conventionnelles et abondamment disponibles comme le solaire et l’hydroélectrique. Mais l’option peut être ouverte pour le long terme (création d’écoles et de centres de recherches spécialisés) et dans un cadre régional.
Lorsque l’on analyse la politique énergétique menée au Niger jusqu’ici il en ressort un point positif. C’est le barrage de Kandadji. Certes il n’est pas encore finalisé. Certes sa capacité initiale a été revue à la baisse. Certes son financement a été démesurément long. Mais il faut reconnaître que Kandadji c’est d’abord le fruit d’une persévérance. Le potentiel a été identifié très tôt mais sa concrétisation s’est heurtée à des difficultés de financement. Mais les efforts menés par les administrations successives ont fini par porter leur fruit.
En dehors de ce projet plusieurs points faibles marquent la politique énergétique du Niger. Ils transparaissent à la lecture de l’étude précédente sur le bilan et le potentiel énergétiques du Niger. On peut les synthétiser en 4 points :
Le très faible niveau de consommation énergétique ne favorise pas le développement économique.
Figure 3 : Une consommation énergétique trop faible pour favoriser le développement
De même la répartition sectorielle des consommations énergétique reflète l’extrême faiblesse du tissu industriel nigérien et traduit l’ampleur du travail qu’il reste à accomplir par une politique énergétique qui se veut au service du développement.
Figure 4 : Une structure de consommation déséquilibrée, reflet du sous-développement
Étudier l’énergie au Niger, c’est étudier l’histoire d’une dépendance. La totalité des produits pétroliers est aujourd’hui importée. De même avec 90 % de son énergie provenant du Nigeria, la NIGELEC n’est pas plus qu’un prolongement commercial de la PHCN (Power Holding Company of Nigeria) qui a succédé à l’ex NEPA (National Electric Power Authority). Une dépendance qui pèse très lourd sur la balance de paiements : 40 milliards d’importation par an !
Figure 5 : Une dépendance énergétique excessive
L’exploitation du bois dévaste près de 150 000 ha chaque année. Il existe certes une stratégie spécifique en matière d’énergie domestique, mais celle-ci n’a pas contribué à réduire significativement la trop forte tension sur le couvert végétal. Le taux de substitution au bois dans les ménages est d’environ 3 %. C’est trop peu, surtout pour un pays à deux tiers désertique qui connaît des sécheresses et des famines chroniques.
Figure 6 : Une écrasante domination de la biomasse
On peut reprocher à la politique énergétique nigérienne d’avoir sous-développé les sources de production décentralisées. Comme nous l’avons signalé des facteurs comme l'immensité du pays, sa très faible densité démographique (7 hab/km2), la grande disparité géographique de son peuplement et un faible taux d'urbanisation (moins de 20 %) militent pour l’exploitation des énergies décentralisées. Il est clair que pour atteindre un accès universel à l’énergie il faut développer l’électricité rurale grâce aux sources décentralisées. Au lieu de cela, les sources d’énergie comme le solaire ou l’éolien sont restées à un stade de développement embryonnaire. Cela conduit à un accès inégalitaire à l’énergie entre zones rurales et zones urbaines. La notion de service public de l’énergie est dès lors une vague chimère.
L'analyse critique de la politique énergétique nigérienne a permis d'identifier clairement les raisons de son échec. A partir de là, il est aisé de dégager les axes essentiels qui doivent constituer les piliers d'une nouvelle politique énergétique à la fois digne d'un pays aussi richement doté par la nature que le Niger, mais également véritablement au service du développement et soucieuse de l'environnement.
La nouvelle politique énergétique du Niger doit être axée sur 4 axes majeurs. Elle doit ainsi :
Le niveau de consommation énergétique trop bas ne permet pas d’envisager un développement économique sérieux. Le schéma de développement classique passe par un développement industriel. Tous les pays développés se sont construit une industrie forte avant de se diversifier vers les services.
A partir de là il est clair qu’il faut produire de l’énergie massivement. Aucun moyen de production ne doit être négligé : solaire, hydroélectrique, thermique au gaz ou au charbon, pétrole… La bataille de l’énergie commence aujourd’hui.
Il faut rompre avec une politique de dépendance trop pesante et s’atteler à construire notre indépendance énergétique et à garantir la sécurité de nos approvisionnements. Pour cela il faut mettre en valeur nos propres ressources.
Si les projets en cours de réalisation actuellement se concrétisent, un pas significatif serait accompli vers l’indépendance énergétique, du moins pour ce qui concerne les produits pétroliers avec la construction d’une raffinerie à Zinder.
Mais la question de l’électricité reste critique. Nous dépendons encore à 60 % du Nigéria. A ce propos les évènements récents sont édifiants sur notre capacité presque dramatique à faire des mauvais choix. En effet, en début 2008, en pleine coupe d’Afrique de football (les amateurs s’en souviennent encore) la NIGELEC a décidé de renforcer sa capacité d’importation d’électricité à partir du Nigéria. Ce choix est officiellement justifié par la nécessité « d'éviter le recours à des solutions de remplacement particulièrement coûteuses (générateurs au gaz, au diesel ou au kérosène) »1. Le montant du projet est de 4 milliards de FCFA.
De façon absurde et contrairement à ce qui était avancé par la NIGELEC, dans les mois qui ont suivi ce projet, les nigériens ont vécu un véritable cauchemar et leur alimentation électrique est devenue encore plus aléatoire, avec les dommages que cela peut occasionner.
Le gouvernement a dû réagir en urgence en adoptant en conseil des ministres la décision d’acquérir des groupes électrogènes au gaz et au fioul pour soutenir la réserve froide disponible à la NIGELEC. Coût de l’opération : 20 milliards de FCFA2.
Au final on a perdu sur les 2 tableaux : d’un côté on a déboursé de l’argent pour paradoxalement accentuer notre dépendance énergétique et, d’un autre côté, on a fini par débourser de l’argent non prévu dans des moyens de production qu’on voulait éviter et qui eux-mêmes augmentent notre dépendance (le fioul et le gaz sont importés).
Le Niger ne doit plus répéter les mêmes erreurs et doit admettre qu’aucun pays au monde, même celui qu’il juge être son « frère », ne lui donnera durablement de l’énergie en se privant lui-même. Dès lors il faut se donner les moyens d’acquérir son indépendance énergétique.
La déclaration de politique énergétique de 2004 affirme la priorité donnée à l’émergence d’énergies alternatives au bois de chauffe. Nous pensons que la préservation de l’environnement doit être une urgence absolue. La perte du couvert végétal et l’avancement du désert font partie des menaces les plus critiques pour l’avenir du pays. C’est presque une petite révolution (technologique et culturelle) qu’il faut accomplir pour proposer des substituts crédibles au bois.
Plusieurs énergies alternatives sont déjà massivement disponibles au Niger ou le seront bientôt : charbon minéral, énergie solaire, gaz des villes. Il s’agit des les rendre accessibles à tous à un prix compétitif et sous une forme qui autorise une évolution douce des modes de vie et des pratiques.
Le service public doit garantir à tous et partout un accès universel et équitable à l'énergie, garantir un prix raisonnable et assurer une disponibilité continue de l'énergie.
Seul l'Etat ou une entreprise publique peuvent remplir efficacement ce rôle. La privatisation de la NIGELEC était à l'ordre du jour il n'y a pas si longtemps. Soyons clair : ce serait une erreur stratégique monumentale. Encore une fois l'énergie n'est pas une marchandise comme une autre. Un pays comme le Niger ne peut pas se contenter de sa situation actuelle. Or toute tentative de développement du secteur énergétique nécessite des investissements lourds avec des délais de retour sur investissement longs. Les sociétés privées visent avant tout à faire du profit, ce qui peut être incompatible avec une mission de service public.
Pour la mise en œuvre de ces objectifs plusieurs axes opératoires sont nécessaires à court et moyen termes. Nous consacrerons ultérieurement une étude entière à faire des propositions concrètes et argumentées en vue d’atteindre ces objectifs.
Chaque sous secteur de l’énergie est régi par des textes qui composent le corps du cadre législatif de l’énergie.
Tep : tonne d’équivalent pétrole. Elle vaut 41,868 GJ (10 Gcal), ce qui correspond au pouvoir calorifique d’une tonne de pétrole. Le pétrole étant le combustible le plus utilisé, les économistes de l’énergie choisissent cette unité de référence pour comparer entre elles les différentes sources d’énergie. Les équivalences sont calculées en fonction du contenu énergétique ; ce sont des moyennes choisies par convention.
MW : c'est le multiple d'un watt, c'est à dire l'unité de puissance qui correspond à la quantité d'énergie consommée ou produite par unité de temps. (symbole W). 1 MW est égal à 1 000 000 W.
kWh, GWh : un kilowattheure (kWh) est la quantité d'énergie égale à 3,6 millions de joules ou 3600 kJ. Un kWh correspond à la production ou à consommation d'un appareil électrique de mille Watts pendant une heure. On utilise aussi ses multiples exprimés en GWh (gigawattheure) ou TWh (térawattheure), avec 1 GWh = 1 000 000 kWh et 1TWh = 1 milliard de kWh.
kWc : le kilowatt-crête équivaut à 1000 watt-crête. Le watt-crête est une unité de mesure représentant la puissance électrique maximale délivrée par une installation photovoltaïque pour un ensoleillement standard de 1 000 W/m2 à 25 °C. L'utilisation principale de cette unité est la comparaison du rendement et du prix des matériaux photovoltaïques.
Stère : unité de mesure de volume utilisée pour le bois. Le stère équivaut à un mètre cube, soit un empilement de rondins ou de quartier de bois d'un mètre de long, et d'un volume équivalent à celui d'un cube d'un mètre de côté. Une valeur exprimée en stères exprime le volume apparent du bois, ne tenant pas compte de l'espace existant entre les bûches.
Baril : une unité de mesure utilisée pour le pétrole brut et ses dérivés. Un baril de pétrole équivaut à environ 159 litres.
Energie primaire : C'est la première forme de l'énergie
directement disponible dans la nature : bois, charbon, gaz naturel, pétrole,
vent, rayonnement solaire, énergie hydraulique, géothermique…
L'énergie primaire n'est pas toujours directement utilisable et fait donc
souvent l'objet de transformations : exemple, raffinage du pétrole pour avoir
de l'essence ou du gazole ; combustion du charbon pour produire de
l'électricité dans une centrale thermique.
Energie secondaire : c'est une énergie obtenue par la transformation d'une énergie primaire au moyen d'un système de conversion : par exemple, une centrale thermique produit de l'électricité (énergie secondaire) à partir de charbon (énergie primaire). Une énergie secondaire peut aussi résulter de la transformation d'une autre énergie secondaire ; c'est le cas d'une centrale thermique alimentée en gaz de haut fourneau.
Energie finale : l'énergie finale ou disponible est l'énergie livrée au consommateur pour sa consommation finale (essence à la pompe, électricité au foyer,...).